68 Km parcourus en 16h37, 121ème sur 150 classés et 46 abandons !!!

Vous attendiez tous avec impatience le récit de cette course, première pour moi en montagne...J'ai écrit ce texte le lundi qui a suivi la course, en italique apparaissent des appréciations ajoutées lors de la retranscription.

Samedi 7 juillet 2012, 2 h du mat', je m'agite sur le matelas gonflable, je sais qu'il faut dormir encore un peu.

2h50, c'est plus fort que moi, je me met en action. La méticulosité de la préparation est primordiale. Je ne pense qu'à cela depuis une quinzaine de jours; tout est prêt: la "bouffe de sportif", le sac et le nécessaire pour le "sun & cloud", le "général" en particulier.

Petit déjeuner à la frontale, cette fin de nuit est calme, il y a d'autres concurrents dans le camping qui se préparent également.

C'est avec deux d'entre eux que je me mets en route vers le départ. J'émarge la feuille de course, il est 4 h30, ambiance photos et bise aux copains.

Dawa Sherpa, futur vainqueur, prononce quelques mots. Je l'ai rencontré quelques jours auparavant (photos et autographe), dans le "civil", il ne paie pas de mine.

5h05: top départ ! Ayant allumer la montre GPS trop tot, elle ne se déclenche pas immédiatement mais les deux énormes feux de bengale retiennent mon attention, CA VA CHAUFFER !

La course commence par 1400 mètres de dénivelés, "cul à cul". il me faudra déjà jouer des quadriceps pour sortir de la file, je monte avec des gars que je retrouverai régulièrement. Premier point de contrôle, le soleil se lève et révèle peu à peu la montagne corse. Au loin, plus haut sur la gauche, la Bocca Alla Porte de apparaît ainsi que le versant sur lequel nous redescendrons (beaucoup plus tard dans la journée !).

Première crête et premier ravito léger - banane et eau - et c'est reparti pour 8 km de piste, je cours enfin, dans la fraîcheur du matin.

J'essaie d'accrocher une concurrente anglaise, nous nous suivons jusqu'au second ravito, après une première descente plutôt simple. Aujourd'hui, je me rend compte que je n'étais pas très "détendu" dans cette première descente, les jambes trop raides, me fatiguant inutilement à chaque appui, un autre m'a dépassé en sautillant, relax.

Arrivée à un ravitaillement complet, un membre du staff me prend en charge, me demande ce que je veux, m'aide à remplir ma poche à eau. Un peu betement, je ne mange rien d'autre qu'un gel et remet de la poudre de perlimpinpin dans ma gourde.

Direction le lac de Ninu. Montée en sous bois, la matinée est déjà bien avancée. C'est à la sortie de la foret que mes ennuis commencent, mon estomac soudain se ferme, cela commence à "bouillir"...Quels mots utiliser ?

La montée devient pénible alors que j'entre de plein pied dans la moyenne montagne. Le lac se fait attendre et qui connaît la montagne sait que derrière chaque ressaut s'en cache un autre. Alternant marche et trottinement, je m'appuie sur mes bâtons, mon horizon s'élargit pour faire place à une vaste pelouse dont malheureusement je n'apprécie pas la qualité molletonneuse. J'apperçois sur ma gauche des coureurs qui convolent.

3ème ravitaillement. Divine surprise: de l'eau gazeuse et fraîche ! ! Un bouteille d'1,5 litre ne sera pas de trop. Mon ventre s'en porte mieux et me permet de manger quelques morceaux de fruits - bananes et oranges- tout en discutant avec deux randonneurs allemands à qui j'explique le principe et le parcours de la course, in english please.

Je repart doucement après une vingtaine de minutes d'arrêt avec des gâteaux apéro au goût salé. Mon appareil digestif s'en trouve un peu ragaillardi et peu à peu mes jambes se remettent à courir.

Depuis une paire d'heure, je bois régulièrement à la pipette. Cela a été mon seul moyen de garder le rythme: 10 minutes et hydratation etc...

Passage par le refuge de Pietra Piana, déjà près de 7 heures de course et le gros morceau de la journée s'annonce.

Un coureur du cru entame la discussion, me dit que le rythme est lent comparé à ses temps habituels ici, il me décrit la montée et repart avec moi, il prend rapidement de l'avance. Je le retrouverai au 40ème km, il abandonnera.

Remise en route donc, j'entame une éprouvante montée sous le soleil: petits passages sur des dalles avec pose des mains, petits répits dans les aulnes et ainsi de suite.

L'organisation présente dans la brèche - si lointaine, si haute - faite entendre sa voix et encourage chaque coureur qui débouche là - haut. Un drapeau maure flotte sur ce ciel bleu et chaque pas nous en rapproche. Je rejoins un "X - men" qui lui aussi rencontre de sérieux troubles digestifs, je l'encourage et nous repartons ensemble doucement, il ne peut en être autrement, pour le dernier tiers de cette ascension.

Petit réconfort avant la dernière partie de pierraille: un grand verre d'eau glaccée corse sortant des entrailles de cette magnifique montagne. Des randonneurs nous encouragent, je blague, histoire d'oublier un instant les efforts du moment.

Arrivée à la Bocca Alle Porte, 2250 m, point culminant du G.R 20, un G.O dit de moi : "il est cuit le gars". Je pose mon cul et admire le paysage, splendide !!

Je grignote un petit bout de barre aux céréales, la descente s'annonce rude. Aux pirres de la montée succedent les rochers menant vers les lacs de Capitellu et Mellu: pose des mains, passage en via ferrata et corde tendue dans la pente avec de gros gravillons.

Le fait d'avoir franchi le point le plus hait me fait dire que j'irai jusqu'au bout. Je suis passé par des états tellements différents, oscillant entre colère et lassitude, joie et douleur...c'est la rage qui a dominé et qui m'a permis de finir.

Des touristes chaussés de baskets peinent dans la montée vers les lacs. Arrivée au lac de Mellu, grandes gorgées d'eau fraiche - merci les enfants - et promesses d'un ravitaillement proche.

Chemin de cascadeur avec des jambes à toute épreuve, je me rafraichit la tête dans le torrent. Je dévale, je caracole jusqu'au parking des bergeries de Grutelle, dans la vallée de la Restonica. X - men me rejoint, vaincu par les naussées, il abandonne.

Même scénario pour moi: eau gazeuse, banane et orange, TUC pour repartir. Je prends le temps et me fais masser, ce qui provoque des crampes ! !

Je repars pour 9 km de descente, dans les bois, le long de la Restonica. Cela fait maintenant deux fois que j'entends que je suis dans les temps. J'accroche deux gars, nous nous distançons, nous rattrapons; ils s'inquiétent des kilomètres qui défilent, ne voyant pas arriver l'ultime ascension.

Enfin, nous arrivons chez César, au km 52, une 1/2 heure avant cette "barrière horaire", il est 17h30. Eau et banane, 5 minutes de récup' et dépliage des bâtons. En route.

Cette dernière ascension vers la vallée et les gorges du Tavignanu sera pénible, le parcours est droit dans la pente, je choisis le sentiers en lacets, la crête se fait attendre. Je me laisse rejoindre - volontairement ? - par d'autres coureurs, histoire de rompre la solitude.

Arrivée sur le plateau et à la bergerie d'Alzu accompagné par l'hélico de la sécurité civile qui évacuera une concurrente affaiblie. Petite discussion avec un gars qui change de semelle pour la descente mais qui semble plutot sceptique sur cette tactique. Il repart avec une demoiselle à l'accent chantant.

Repliage des bâtons. La descente du Tavignanu restera un superbe moment de descente et de vitesse en foret. Mes jambes répondent présentes, je dépasse 6 concurrents. Des cloques se forment sur les plantes de pieds.

Un point d'eau, très froide, en directe de la source, passage d'éponge sur mon visage. C'est le début du chemin en balcon en surplomb du torrent. Dernier ravito, le chien du G.O se plaint d'être là, Corsica Cola et orange me réveillent les papilles. Je repars sur la pointe des pieds pour les 4 derniers kilomètres dans l'obscurité de la fin de journée.

Je sors la frontale, Corté apparait, mes jambes s'agitent. Je passe sous la citadelle et descend en volant les marches de la vieille ville. Je récupère mon fils et passe la ligne avec les enfants. Je l'ai fait !!

Je suis ému à écrire un mois après le récit de cette course. C'était un objectif, il est atteint, les jours qui ont suivi ont été cools. J'ai trainé une ampoule pendant quelques jours, pas grave.

Je suis surpris de la résistance qu'est capable d'endurer notre corps, si préparé soit - il.

La vidéo et les photos viendront rapidement.

Restonica Trail

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